Sa silhouette est cachée sous un large t-shirt qui ne parvient pourtant pas à dissimuler cette bosse, si ronde, qu'on devine sans mal qu'un petit être se cache dessus. Ses traits étaient tirés, creusés par la fatigue des nuits sans sommeil, dont ils étaient tous les deux esclaves. Il la regarde pourtant avec les yeux qui brillent alors que leur bébé dort profondément, blottit contre son torse. Puis, son visage, si angélique, se transforme, la douleur s'installe sur son visage. Une contraction.
Drew est, une nouvelle fois, impuissant face à cette douleur inconnue. Une douleur qu'il croyait passagère, du moins, elle était censée l'être. Elle entoure ses bras contre son ventre. Drew est comme pétrifié, il ne comprend pas ce qu'il se passe -ou ne veut pas le comprendre- pourtant, il est médecin, il est pédiatre. Il sait. Il sent. Le bébé arrive, bien trop tôt. Drew affiche une mine calme, détendue mais, son souffle se saccade. Très vite, trop tard pourtant, ils se retrouvent dans l'ambiance familière de Drew. Une chambre d’hôpital aseptisée, les bips réguliers des machines étaient inaudibles quand les cris de Laurel résonnaient dans la pièce. Il n'a pas le droit d'intervenir, pas quand il s'agit d'un membre de sa famille, trop d'implication personnelle. Il se contente de lui tenir sa main, qu'elle écrase assidûment. Il grimace mais, ne bronche pas. Il ne parvient pas à détacher ses yeux du sang qu'elle perd, qui coule abondamment. Il connaît déjà la sentence. Les médecins finissent par l'endormir alors que Drew quitte la pièce. Il s'adosse contre le mur, dans le couloir qu'il arpente tous les jours et finit par se laisser tomber à terre. Il enfouit la tête dans ses mains et attends. Il patiente pendant de longues minutes. Il relève la tête les yeux embuées de larmes alors qu'il distingue une silhouette en blouse blanche devant lui. « On a tout essayé. On a rien pu faire » lâcha t-il d'un ton étonnamment compatissant. Les infirmières quittent la salle d'accouchement en larmes, tandis que d'autres essaient de rester dignes. Il essuie ses larmes d'un revers de la main, balaie ses pensées néfastes. Il a Mia et Laurel, c'est le plus important. « C'était un garçon... » annonça t-il alors d'un ton un peu hésitant. Drew ne l'entend que vaguement, il rentre de la salle de nouveau. Sa femme est dans un état second, trop secouée pour réaliser. Aucun son ne parvient à sortir de sa bouche. Il avance vers la sage-femme qui était restée dans la pièce. Elle se retourne, un léger sourire était dessiné sur son visage alors qu'elle tenait dans ses bras, ce petit ange endormi, vêtu de blanc. Elle le glisse dans les bras de Drew. Il baisse le regard sur lui et il l'admire, il se surprend même à sourire. Il était magnifique mais, il était déjà parti. Son monde c'était de nouveau écroulé ce jour. En plus, de la perte de sa première femme, il avait perdu son bébé, et il ne le savait pas encore mais, il allait perdre sa femme. Plongée dans un mutisme profond, deux semaines plus tard, elle disparaîtra, sans un mot, sans une explication.